PORTRAIT DE CHEF
Michel RONCIÈRE

Par Fabien Nègre
  • Chef Michel Roncière
  • Pianovins Couteaux et girolles
  • Pianovins Cabillaud et tomates concassées
  • Pianovins Quasi de veau  et aubergines
  • Pianovins Pêche à la citronnelle

Discret migennois, fidèle dans l’ombre des grands, LORAIN Père & Fils, Joël ROBUCHON, Guy SAVOY, Michel RONCIÈRE pianote, aujourd’hui sa bistronomie loin des vagues et des vogues, dans l'équilibre harmonieux de l’humble fraîcheur d’un artisan.

Le 2 juin 1967, dans la petite ville de Laroche-Migennes, en Bourgogne, lieu d'un destin ferroviaire, entre en gare un garçon d’un monde de purs paysans. Le père, amateur de Chablis, d’abord cheminot puis boucher-charcutier, fabrique son boudin, ses andouillettes et son pâté. La saison des confitures réjouit au jardin des délices : mirabelles, groseilles, framboises. Les conserves en bocaux recèlent des trésors : courgettes, tomates, haricots verts, asperges. Le petit observe. La mère, à la maison, apprête la simple excellence : « Elle préparait un civet de lièvre aux pâtes fraîches. J’aimais regarder ma mère ».
 
Cette belle cuisine familiale mijotée avec ses gibelottes, son coq au vin, son bœuf bourguignon marque son esprit. Chez l’oncle agriculteur, le jeune garçon fait tourner la « moiss-batt », ramasse les cornichons et autres oignons de plein champ. Chez les grands-parents, la ferme élève des poules mais aussi des moutons, cultive un peu de betterave, du maïs et du blé. Issu de l’artisanat local du produit, Michel RONCIÈRE commence tôt son apprentissage au CIFA Auxerre, en 4ème : « L’école n’était pas mon truc mais j’étais bon en maths, je savais calculer et compter ».
 
L’adolescent qui s’imagine garde forestier pour se balader en forêt tâtonne le métier ispo facto au plus haut, dans le triple étoilé « La Côte Saint-Jacques » à Joigny. « Ma mère me présente et se présente ». Ses maîtres d’apprentissage, Michel et Jean-Michel LORRAIN, l’accueilleront quatre ans en alternance. Titulaire d’un CAP, à 18 ans, le bon élément se voit bombarder chez un étoilé très prometteur, rue Duret, dans le 16ème arrondissement de Paris. Il s’agit tout simplement d’un des plus grands chefs mondiaux : Guy SAVOY.
 
Le « campagnard un peu perdu dans la capitale » qui a du mal à se frayer un chemin dans le dédale du métropolitain y restera deux ans. Ensuite, à 20 ans, grâce au maître de Bourgoin-Jallieu, il effectue son service national sous les drapeaux, à Matignon, période CHIRAC. Le timide s’exerce à la terrine de foie gras en bocaux auprès de l’étoilé Bernard ANDRIEUX, à l’Auberge des Touristes, à Durtol, dans le Puy-de-Dôme. Au légendaire numéro 32 de la rue de Longchamp Paris 16ème, avec Joël ROBUCHON, durant deux ans, dans une brigade de rêve cousue de furieux, Éric LE CERF, Benoît GUICHARD, Maurice GUILLOUET, il prend des leçons de gastronomie.    
          
Rigueur, patience et produits, toujours plus haut en goût : « agneau pastoral pané à la truffe », « tête de cochon entière, désossée avec sa bonne purée », « bar au verjus, de belles tartes aux fraises ». Michel RONCIERE retourne alors aux côtés de Guy SAVOY, rue Troyon puis à la Monnaie de Paris, pendant 23 ans. Il y gravit toutes les marches jusqu’à chef adjoint, ébloui par une empreinte culinaire nette, une qualité de produit sublime, des cuissons métaphysiques. Une « soupe d’artichauts aux truffes, brioche truffée » inoubliable. Un bar aux épices éternitaire.  
 
Depuis 2018, chez PIANOVINS, il recherche dans la sardine marinée, la lisette ou le maquereau, « un moment simple mais d’une grande saveur. Je prends de la passion, je fais plaisir. Je sais ce que j’envoie. La magie de la complémentarité tient dans les silences, les regards, un duo qui fait couple ». Imprégné de l’horizon des visions, des pratiques, des savoir-faire de l’art de l’accueil, de l’élégance et de la civilité d’une grande Maison, Michel RONCIÈRE s’applique bien modestement à son bistrot de poche, humble mais exigeant.
 
 

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