Calme girondin cadillacais, délicat érudit du sauternais issu d'une lignée de viticulteurs et de pharmaciens, méditatif gérant du « Laboratoire Oenoconseil » depuis 1996, Antoine MEDEVILLE, à l'exposition parfois médiatique des oenologues bordelais fondateurs, privilégie l'humaine discrétion du terrain, la généreuse attention journalière portée aux intentions des raisins de ses vignerons qu'il fédère afin de représenter leurs domaines dans un autre style.
Venu le 23 juillet 1965 au milieu des treilles de ses grands-parents, en fermage non loin de Cadillac, le spécialiste du ceps passe sa plus tendre enfance dans le moult sans jamais faire la moue. Dans cette fratrie de viticulteurs renommés et de pharmaciens réputés, Antoine MEDEVILLE s'imagine, d'emblée, en « vigneron alors que ses amis conseillent ». Il obtient, à 22 ans, son « BTS Viticulture-oenologie » à Blanquefort puis son Diplôme d'oenologie de la Faculté de Bordeaux en 1990. De 1988 à 1995, il exerce comme oenologue à Sancerre dans la propriété et le négoce de la Société Joseph MELLOT, une référence.
A Mèze, au sein des établissements BESSIERE, négociants en Languedoc-Roussillon, il construit des chais, comprend le processus de production de 20 millions de bouteilles. En 1996, retour au berceau bordelais, il s'associe avec le Cabinet d'Edouard MASSY et d'Henri BOYER (ex-fondateurs du Laboratoire de Preignac) pour créer « Le Laboratoire d'oenoconseil de Pauillac ». En 2007, ils élargissent leurs activités en mettant en place le « Laboratoire Oenoconseil de Beychac et Caillau » ainsi que celui de Saint-Emilion, en septembre 2015 gérés par Arnaud CHAMBOLLE.
Les trois oenologues possèdent une philosophie commune et des compétences complémentaires : Antoine MEDEVILLE aime apprécier le niveau de maturité du raisin, la clé pour obtenir l'éclat du fruit, la rondeur des tanins. Henri BOYER, le spécialiste de la vigne, se montre très exigeant sur les façons culturales, il prône un équilibre végétatif adapte à chaque parcelle. Edouard MASSIE recherche une approche rigoureuse sur les vinifications, il aime les extractions maitrisées. Les trois laboratoires couvrent ainsi le sauternais, le Médoc, le Libournais et l'Entre-deux-mers.
Thomas MARQUANT et Emilien DELALANDE viennent élargir les rangs d' « Oenoconseil Pauillac ». L'oenologue-terrain avoue contribuer à un minutieux travail qui produit moins de volumes et davantage de bouteilles. Avec une remarquable écoute, il se positionne tel « un médecin de campagne qui connaît tous les secrets de famille ». Loin des oenologues-stars qui ont changé le « métier », Antoine MEDEVILLE ambitionne un suivi des propriétés dans les vignes, « là où le vin se fait ». A dessein, il se lance dans le conseil viticole et accompagne certains propriétaires dans tous les choix stratégiques au vignoble (travail du sol, travaux en vert).
Toutes les dégustations de cuves, deux fois par semaine, à la propriété, n'excluent pas l'utilisation de techniques analytiques modernes qui structurent un recul et une profondeur d'expérience. « En deux jours, une cuve change. C'est un travail vraiment sur mesure, dans une humanité concertée sur chaque cuve ». « Nous respectons le terroir, nous voulons des vins concentrés, soyeux, longs en bouche. La maturité des raisins est centrale. Le vigneron a besoin d'un oeil extérieur. En une année, on fait autant de vinifications qu'un vigneron dans son existence ».
« Il n'y a pas une solution idéale mais des solutions adaptatives ». Antoine MEDEVILLE accompagne, aujourd'hui, près de cent cinquante vignerons différents par leurs tailles et leurs visions dans une démarche qualitative globale : dégustation des millésimes anciens, commercialisation, communication. L'oenologue avisé d'essayer une définition de son style : « des vins pas trop surmûris mais à bonne maturité, des tannins puissants et riches, des extractions moins poussées, lentes, douces, des bâtonnages sur lies, des pigeages à très belle maturité pour un moelleux, une douceur. Loin du boisé, les vins évoluent vers le fruit. Nous réalisons les propositions d'assemblage de concert avec le vigneron. Des vins de plaisir, de consommation courante aux vins de garde ».
En mai 2008, l'enfant des vins liquoreux d'un siècle réalise son rêve en achetant le Château FLEUR LA MOTHE, à Saint-Yzans-de-Médoc, avec ses associés. Sur 15 hectares de parcelles classées « Cru Bourgeois » depuis 1932, les collines dénommées « croupes de Graves » ou « buttes » (mothes en patois), voient la rivière. Ce qui assure une bonne régulation thermique à l'un des meilleurs vins de l'appellation qui collectionne les récompenses.
Au « Laurent »*, à Paris, le 9 février 2016, l'oenologue-conseil et ses viticulteurs, dans un dialogue toujours instructif et productif présentaient des « vins de caractère abordables » : Château LE PEY (Médoc), Château POITEVIN (Médoc), Château TOUR CASTILLON (Médoc), Château DE PORTETS (Graves rouge), Château FONREAUD (Listrac-Médoc), Château CISSAC (Haut-Médoc), Château CARONNE SAINTE GEMME (Haut-Médoc), Château MOULIN DE BLANCHON (Haut-Médoc), Château D'ARCINS (Haut-Médoc), Château LA BRIDANE (Saint-Julien), Château CAROLINE (Moulis), Château TOUR DE MARBUZET (Saint-Estèphe), Château TOUR SIEUJAN (Pauillac), Château CHARMANT (Margaux).
Photo : Alain Benoit