OKINAWA : LES ÎLES FÉÉRIQUES - 2 - PAR FABIEN NÈGRE

La gastronomie locale se caractérise par sa nourriture saine, équilibrée qui entraîne une longévité exceptionnelle. La cuisine d’Okinawa se scinde en deux catégories. La première regroupe les plats élégants préparés pour le Roi durant l’ère du Royaume de Ryûkyû.

La deuxième rassemble les plats modestes du peuple (Uchinanchu). Les deux types trouvent leur source au Japon et en Chine. Dans les restaurants typiques, le « purple rice » (riz rouge/pourpre), la soupe au porc (nouro) qui compte 17 types sur l’île, le « saké aux piments » (shigaki) et le poivre long agrémentent les repas. La chair tendre de l’anguille côtoie le tofu d’Okinawa (shima) et le lait de tofu, l’échalote des soupes miso tutoie les nouilles aux œufs, autre spécialité insulaire. Le crabe d’Okinawa, au goût intense de noix de coco, onéreux et rare, se cuisine à la vapeur ou en soupe. En issue, la mangue d’Okinawa, rarissime, constitue une excellente façon de digestion.

Le Japon se distingue également par sa longévité et Okinawa, plus précisément, le village d’Ogimi, arrive en tête de cette étonnante caractéristique. Dans la zone nord d’Okinawa, la longévité bat tous les records. De multiples raisons (décontraction des personnes, tempérament optimiste des habitants, climat subtropical à la température constante, 22,5°C toute l’année…etc…) expliquent ce phénomène mais la principale semble la nourriture : du riz, de nombreux légumes, des fruits de mer, des algues, du tofu, une bonne quantité de viande, peu de sel. Cette alimentation totalement équilibrée alliée à un exercice actif dans la vieillesse augmente la vitalité des gens d’Okinawa.

Toute l’année, les activités terrestres et aquatiques abondent. Les îles de Yaeyama éblouissent par leurs sites de plongée. Sur la côte Shiraho de l’île d’Ishigaki, les rares coraux « tables » accueillent des raies Manta géantes. Tant de raies peuplent le détroit entre l’île d’Iriomote et Kohama, que le lieu se nomme « Manta Way ». L’île de Yonaguni diffère par ses ruines mystérieuses, ses sites d’observation des requins marteau. Les récifs coralliens magnifient les îles Miyako. Les longues plages de sable blanc, l’eau bleue claire transparente enchantent. La côte ouest de l’île Shimoji découvre des sites de plongée populaire. Cette topographie îlienne complexe implique des possibilités quasi infinies de sites sous-marins.

Le fameux Yabiji, au nord de Miyako, délimite le plus grand récif corallien nippon. Les îles Kerama incarnent le sommet des profondeurs pour la diversité des poissons, la transparence de l’eau, la multitude des type de coraux. A Okinawa, les merveilles de la grande pêche brillent pour le thon, le marlin, la dorade amenés par le courant de Kuroshio. Les parachutes ascensionnels, accrochés aux bateaux, flottent entre ciel et mer. Le kayak de mer, promenade relaxante, apporte une autre vision du paysage. Le ski nautique, sensation grisante, coupe la surface de l’eau dans un cadre mirifique.

Dans la région montagneuse du nord d’Okinawa se trouve une forêt subtropicale que les locaux nomment « Yanbaru ». Seul endroit au monde qui abrite le pic d’Okinawa (Noguchigera), le râle d’eau de Yanbaru (Yanbaru Kuina), le Yanbaru Tenaga Kogane (scarabée d’or). Cette faune et cette flore rares, parcourues par les mangroves du village d’Higashi. L’écotourisme orienté sur l’ornithologie prend son essor dans le village de Kunigami. A Okinawa, les mers riches de deux cents sortes de récifs coralliens épousent les vertes montagnes éternelles si caractéristiques de ces paysages apaisés.

Okinawa, une histoire de rythmes, de couleurs et de formes depuis 1000 ans. Jusqu’au Xème siècle, des groupes de parenté créèrent des tribus en diverses localisations de l’île. Les batailles pour le pouvoir accouchèrent de trois royaumes : Hokuzan au nord, Chuzan au centre, Nanzan au sud. En 1429, l’unification de ces royaumes marque le début de l’histoire de Ryûkyû. En relation étroite avec la Chine depuis toujours, le territoire accueillait des délégués chinois nommés « Sappushi », convoyés afin d’assurer la succession royale. Le commerce transitant par le royaume assurait une prospérité à l’image du négoce entre le sud-est de l’Asie et le Japon.

En 1879, le gouvernement de Meiji acheva 450 ans d’histoire d’une relation complexe avec la Chine en créant la préfecture d’Okinawa. A la fin de la seconde guerre mondiale, Okinawa délimita le seul champ de bataille terrestre du Japon. Par la suite, Okinawa, sous contrôle militaire américain pendant 27 ans, retrouva sa liberté en 1972. Avec une population représentant seulement 1% de l’Archipel (126 millions), Okinawa présente, en 2010, une croissance économique de 7% (3,7% dans l’ensemble du Japon) et se positionne comme une destination en pleine croissance à la fois au Japon, en Chine et dans le monde entier.

Situé entre l’Océan Pacifique et la Mer de Chine orientale, empli de nature, gorgé de culture et d’histoire, Okinawa diffère également par ses arts du spectacle (danse, musique, théâtre). Destinés à l’origine au subtil divertissement des délégués chinois, le « Kumiodori », inspiré des danses nipponnes et chinoises, symbolise la valeur culturelle par excellence. Créées par Tamagusuku Chokun, officier de l’Office Royal de Danse du gouvernement de Ryûkyû, ces chorégraphies magnifiées par des costumes impressionnants, des mouvements élégants, attirèrent l’attention lors du sommet Ryûkyû-Okinawa en 2000.

Dans les deux catégories de musique, classiques et folkloriques, le Sanshin, instrument à cordes amélioré du Sanxian, fonde la base des compositions. De génération en génération, les techniques se transmettent à l’instar des arts traditionnels : poterie, laque, textiles teintés et tissés, verrerie. Depuis le 14ème siècle, le peuple d’Okinawa pratique la poterie appelée « Yachimun », influencée par la Chine, la Corée, le Japon ainsi que le sud-est asiatique. Le spectre des procédés de laque importait au plus haut point dans la fabrication des objets laqués offerts en cadeau pour l’empereur de Chine et la famille du Shôgunat du gouvernement d’Edo.

Le costume « Bingata » ne se portait que dans le cadre de la famille royale, la noblesse et les danseurs du palais. Les étoffes tissées d’Okinawa se distinguent autant que les souffleurs de verre. Les habitants (Uchinanchu) prisent les évènements traditionnels, festivals, festivités sportives. Sur toute l’île, se danse le « Eisa ». Lors de la saison « Obon », selon le calendrier lunaire, des groupes de jeunes gens dansent, chantent de porte à porte, de village en village, prient pour la bonne santé, le bonheur des familles. Ces performances de ballet, danses galantes au rythme des tambours, parcourent la ville. Le marathon de Naha attire, chaque année, plus de 27 000 participants, la plus grande course publique du Japon.

La fête du nouvel an célèbre le château de Shuri. Le festival de Sakura (cerisiers ornementaux) de Yaedaka, à Mobutu, honore le début de l’année. Ensuite, Nago fête les ruines de son château. L’exposition internationale d’Okinawa met à l’honneur les orchidées. Suivent l’observation des baleines dans les eaux des îles Kerama puis le marché des poteries dans les ateliers des villages de Yomitan et Tsuboya. Les exhibitions de poupées de chrysanthèmes décorent Nago tandis que le festival des jardins d’azalées d’Higashi bat son plein. Avril rend hommage aux champs de lys d’Ie-jima.

Les bateaux-dragons rivalisent à Naha. L’océan possède son festival à Ishigaki et son carnaval dans le port de pêche. Des feux d’artifice au Parc Ocean Expo d’Okinawa au Festival de Rock, en passant par le grand tir de corde de Naha, la transe de la fête estivale saisit tous les citoyens si attachants de ce singulier archipel bercé par les cloches de son parc mémorial de la paix à Itoman. A Okinawa World (managé par Miyazato NAOKI), la grotte calcaire Gyokusendo (magnifiquement orchestrée par Higuchi HIROSHI), la plus longue d’orient, stupéfie par ses architectures artistiques de stalactites et stalagmites. Les maisons traditionnelles, les boutiques de textile teint (Bingata) reproduisent l’ancien style d’Okinawa.

Dans le village de Ryûkyû-Mura, sous la houlette de son Directeur Général Hirata SATOSHI, les buffles domestiques, l’extraction du sucre de canne, le jardin botanique aux 2000 sortes de plantes subtropicales, les fruits (mangues, ananas) forment un paysage de paradis. A Murasaki-Mura, les quartiers anciens reconstruits avec leurs maisons aux toits de tuiles rouges, leurs petits murets de pierre, leurs ibiscus, leurs bougainvilliers, offrent une expérience esthétique raffinée des arts d’Okinawa. Plus loin, le palais de la pâtisserie utilise des ingrédients locaux bruts tels la pomme de terre douce violette (Beni-imo) dans la confiserie artisanale.

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