Dans la ville bouchère des ostensions se manifeste, le 30 décembre 1976, un enfant du potager. « Je passais mon temps au jardin, à ramasser des légumes. Mes grands-parents élevaient des lapins et des volailles ». Le père creusois maçonne, la maman assiste un directeur. « Ma mère cuisinait magnifiquement ». A cinq ans, le basketteur en herbe annonce tout de go : « Je veux faire cuisinier ». L’opiniâtre, à neuf, apprête ses entrées et ses galettes. Une fois par mois, au déjeuner, le samedi, l’odeur entêtante du poulet rôti entier garni de frites maison, l’enivre.
La rentrée se déroule, devant le théâtre du four, à humer les arômes de gâteaux. « Je regardais les reines de Saba couronnées dans leur manteau de chantilly ». Dans ce milieu modeste, le temps de cuisson absorbe tout le temps. Viandes et poissons manquent d’épiphanie. A l’école, rien ne décolle. L’enfant hyperactif se concentre peu, trébuche en 6ème, à Nexon. A 13 ans, l’inoubliable proviseure, Madame PILOU, le convoque et s’exclame : « Tiens-toi à carreau et tu rentreras au lycée hôtelier de Limoges ».
Le 9 septembre 1990, l’interne tenté par l’ombre emploie enfin ses mains loin des bancs du supplice. La tenue crée la teneur. Le goût de l’étude rapproche : « Je fais mon métier, le français pour les menus, les maths pour les additions ». Les maîtres enchantent l’heure. En 1996, le diplômé d’un CAP-BEP-BP, tourne la matière, cultive son goût. Son professeur, Jean-Pierre FARGES, le propulse en Corrèze, à Beaulieu-sur-Dordogne. « Je voulais devenir chef, voir les grands restaurants ».
Au Central Hôtel Fournié, en quête d’une reconnaissance de ses pairs jamais venue de son père, le jeune bricoleur gorgé de volonté, accélère. En 1997, dans l’un des joyaux hôteliers de Courchevel, le Pralong****, érigé dans les années 70 par Albert PARVEAUX, le commis frais émoulu touche des « produits exceptionnels de standing ». Oursins et langoustines, huîtres et saumons Bellevue, l’emportent. Les yeux lumineux des clients le portent.
En 1998, afin d’apprendre l’anglais, le dessinateur de paysages et de visages rejoint la fameuse brigade cosmopolite du bisontin Raymond BLANC, « Le Manoir aux quat’saisons », à Thame. « Rigueur extrême, précision, exécution, résistance physique, pression de fou, j’ai compris pourquoi une carotte devait être toujours tournée de la même manière ». En 1999, à l’Oxfordshire Golf Club, Monsieur OBATTA, propriétaire de 50 Golfs dans le monde, le retient en Angleterre pour décorer tous les buffets. « J’aimais l’art, je recevais Tiger Woods et parfois 3500 personnes par jour ».
A 21 ans, le manager d’une équipe de sept personnes vogue entre les buissons de légumes, les dindes en gelée dodues, les écrevisses et les homards ou les sculptures de fruits. En 2000, le retour à Poitiers le désappointe. Pourtant, au « Panier Poitevin Chédozeau », le grand traiteur régional, ses missions le captivent. « Avec mon camion, mon étuve, mes caisses, je fais les mariages ». Désireux d’un compagnonnage à sa façon, Olivier CHAPUT, durant sept ans, se plonge dans les encyclopédies puis ouvre son premier restaurant dénommé « La Grimolée », dans la Vienne.
Le Chef présente son « clafoutis aux pommes crues et aux feuilles de chou ». Consacré par les guides, de 2002 à 2004, il se voit toutefois contraint de fermer son établissement. En novembre 2005, il reprend la route avec sa petite mallette bleue et ses couteaux pour faire le tour de la restauration parisienne. Pierre MIECAZE, d’ELIOR, le recrute pour le département volume où il apprend la cuisine de masse. En 2010, il organise, dans le 11ème, le premier concept de restaurant gastronomique avec des DJs. Il ouvre également une société de conseil intitulée « ADAPTACARTE ».
En 2011, le dynamique bâtisseur s’associe au créateur évènementiel Nicolas KALPOKDJIAN pour mettre en œuvre « Restolib », des cours de cuisine destinés aux entreprises. Après un parcours durant lequel il a pu découvrir tous les horizons du métier, il tente, depuis 2013, l’aventure de « Show Devant » avec son associé Philippe JOURNOUD. Le chef qui fait bouger le grand Paris aime aussi éduquer les enfants au goût. « Cette histoire forte renvoie sans doute à mon enfance difficile mais proche des produits de la campagne. L’enfant ne triche jamais ».
Ce passionné d’ateliers culinaires joue le rôle de grand frère en toute sincérité. Animateur de l’émission « Un chef à ma porte », entre 2010 et 2012, sur la chaîne Gulli, Olivier CHAPUT dirige le Festival « Bon, ramène tes parents » et préside l’association « Les enfants cuisinent ». Une noble ambition : « faire connaître la cuisine et les produits aux enfants sans aucun a priori ». Le connaisseur inspiré des techniques des cuisines du monde (Pakistan, Brésil, Lettonie) signe son identité culinaire avec une traçabilité sans obsession locavore.
Cet enthousiaste de la transmission recherche le réel plaisir du travail collaboratif. « Une équipe heureuse loin de la tyrannie. Les façons de procéder en management relevaient de l’insulte, de l’humiliation, de l’hystérie. Un seul moyen : l’écoute des désirs, l’anticipation des demandes, l’aménagement des horaires, le dialogue permanent ». Influencé par les fondateurs de la bistronomie parisienne, son sud-ouest et ses voyages, le professeur à l’école hôtelière d’Antony prône la simplicité d’un bon produit accompagné d’une belle sauce.
Il accomplit maintenant ses songes, rencontrer ses maîtres : Michel SARRAN, Michel ROTH, Jacques MAXIMIN, Yves THURIES. La plus intense des consécrations.
Photos : 1 : Olivier Chaput par Action Gourmande – 2 : Gambas sautées aux agrumes - 3 : Gigot d'agneau de 7 heures, léégumes sautés - 4 : Mignon de porc en millefeuille de pommes et airelles - 5 : Opéra de la finale des M.A.F.
Show Devant
38, rue Georges Lebigot - 94800 Villejuif