PORTRAIT DE CHEF
Jérémy CZAPLICKI - Les Oliviers Hôtel L'Ile Rousse

Par Fabien Nègre
  • Jérémy CZAPLICKI

Jérémy CZAPLICKI. Face à la baie de Renècros ourlée du ravissement céruléen, dans l’odyssée relaxante de l’Hôtel Île-Rousse***** Bandol, aux "Oliviers", le talentueux jeune chef engage une ligne sensible de féminité dans la clarté vraie de sa sincérité abondée d’un souci prégnant pour les prises de roche et les syntaxes d’altérité évitant les rets du végétalisme ou les imageries provençales de la trop féconde faconde.  

Aux abords de Roubaix, dans le gris petit village d’Emes, le 8 décembre 1979, un gamin gourmet bondit dans ce Nord qui emporte tout sur son passage. «Ma mère ne se distinguait pas par sa cuisine mais elle faisait bien les frites». La mutation téléporte vite les parents, cadres bancaires, dans les environs de Toulouse. A 8 ans, l’aspirant poursuit ses aspirations dans la ville rose. «Inconsciemment, chaque chose importe. Mon père ne cuisinait jamais». Issus d’une noble lignée de Varsovie, les grands-parents paternels émigrèrent pour des raisons strictement familiales.


«J’ai le souvenir de déjeuners dominicaux, des vinaigres merveilleux sortis des placards, des provenances énigmatiques, un potager avec des cardons, ces grosses blettes onctueuses. Dans le nord, ils se nomment les « chicons »». La grand-mère savait l’art de la soupe de riz grillé. «Son goût m’émouvait». L’élève moyen mais très athlétique, passe le plus clair de son temps sur les terrains de basquet avec son père, joueur à Wattrelos, en nationale 2. Deux grandes pulsions dynamitent : le basket et la cuisine. Affairés au Crédit du Nord, les parents regagnent le domicile très tard.


Livré à lui-même, Jérémy CZAPLICKI prépare à manger à sa petite sœur. La 3ème finissante, le père, inquiet, le place dans un stage de trois jours dans un petit établissement, non loin de Toulouse, à Colomiers, dans l’arrière campagne de l’aérospatiale. «Je faisais des crêpes, des desserts, la joie de la vocation mais il était déjà trop tard pour m’inscrire à l’école hôtelière». En 1992, l’adolescent en or qui découvre son trésor redouble sa troisième pour rentrer, en plein cœur de Toulouse, à « l’Ecole Hôtelière d’Occitanie ».


Avec son calme acharnement, il prépare les concours, «en champion, sans plan B». Dans sa classe, la majorité provient du monde de la restauration. A la maison, en guise de tour de chauffe, il dresse maintenant tous les menus : «Pâtes, puis pâtisseries». Les fins de semaine, il se substitue à sa maman au foyer, assistante du Directeur Général de la Banque pour tout le Sud-Ouest alors que son père dirige, lui, l’Agence toulousaine. Il délivre : «poissons nobles, viandes sélectionnées, légumes choisis au jardin».


Les quatre membres de la quiète maisonnée fréquentent souvent les restaurants, «pour la fête du plaisir» mais point de virées onéreuses dans les trois macarons. Le jeune chef en devenir passe un « Bac Pro Turbo » expérimental dans une classe d’élite de 8 élèves seulement. Dans ces années 90, seuls quelques chefs sortaient du lot dans la ville de Claude NOUGARO : Gérard GARRIGUES, Michel SARRAN, Claude TAFFARELLO. L’année d’apprentissage se déroule chez un chef crucial dans l’histoire du goût toulousain, Dominique TOULOUSY**, aux « Jardins de l’Opéra ».


«Un bonheur absolu, je voulais prendre le train qui passait devant mes yeux, me frotter aux MOF et aux deux étoiles». En 1997, à 18 ans, Jérémy CZAPLICKI entame sa route, en commis de salle, à « l’Hôtel Beau Rivage » du Pouliguen. «Bizarre, violent, dur mais c’était mon choix, une cuisine de poissons et de volume. Déjà aux responsabilités dans cette intense saison, j’aime bien me rendre dans des lieux que je ne connais pas pour la soif de découverte. Mes parents m’ont laissé vivre ma passion même si ma mère s’inquiétait parfois du devenir de son enfant».



En 1999, avec son épouse gouvernante, il tente l’aventure monégasque pour l’ouverture de « Bar & Bœuf » d’Alain DUCASSE. Après le charme méditerranéen des saisons, les jeunes mariés affrontent Paris afin de s’épanouir avec les stars toquées. Au sommet de la mythique « Tour d’Argent », avec la maître queux bi-étoilés Bernard GUILHAUDIN, il éprouve le fastueux tourbillon de la vie parisienne. «De la province, ce fut dur». En janvier 2000, Jean-François ROUQUETTE, alors excellent chef de la « Cantine des Gourmets »*, dans le 7ème, l’intègre au poste de « Chef de partie ».


La bataille homérique pour la deuxième consécration échouera mais tiendra toujours du mystère. En 2004, au Scribe, le fidèle second, apprend le savoir-faire de l’hôtellerie de luxe à la française avec les Lundis du « Cigare Club ». Jérémy CZAPLICKI désire rompre avec son Maître, qui le place au Park Hyatt Paris-Vendôme, avec Christophe DAVID. «Très excité par les challenges, je monte les marches une par une : petit-déjeuner, brasserie, gastro». Rattrapé par son succès et sans doute tout labyrinthe inconscient, le jeune homme du Nord redevient second du grand enghiennois d’origine aveyronnaise, au « Pur »*.


Afin de quitter Paris et ses fantômes banlieusards, «pour rompre le cordon ombilical des chefs», l’homme qui apprécie la complexité de toutes les restaurations en véritable chef d’hôtel, recherche le souffle de liberté des espaces de création loin de l’exécution classique. En 2013, à 34 ans, il parvient au Château de Berne avec son équipe de 25 personnes. «Un endroit magnifique et secret dans lequel je me sens bien pour faire ma cuisine».



Vrai par son sourire, la douceur de sa sincérité, sa quête de perfection, sa gentillesse empathique avec sa brigade, l’énergie de ses assiettes, Jérémy CZAPLICKI, au restaurant gastronomique « L’Orangerie », provoque des coups de cœur. «Je fais le plus beau métier du monde». Avec son style de produits d’ici mâtiné des clins d’œil ressentis ailleurs, sa cuisine ressemble et s’identifie à la topographie d’un paysage marin.



Depuis mars 2016, au restaurant gastronomique « Les Oliviers », ancrée dans la cohérence de son propos, cette manière de matière naturelle délicate s’origine à la fois dans les tissus végétaux, dans les herbes sauvages voisines, dans le réveil des piments équilibré par la fraîcheur de la mâche. La salade de homard bleu courtisée par une floralie de jeunes navets « ginger », vinaigrette de pêches jaunes et feuilles de moutarde dialogue avec les gambero rosso rafraichis par une fine gelée de pastèque au piment doux, caviar Osciètre, arlequin de melons en aigre doux.


Le loup de méditerranée se décline, de manière originale, en trois services : assaisonné de grains de caviar Osciètre, velours d’avocats, pommes granny smith et baies de grenades; en pot-au-feu de fenouil, bouillon de tomates vertes au basilic; étuvé au jus de légumes, artichauts épineux, pistou d’algues et miso de riz rouge. Le ris de veau tourné dans un beurre d’algues, brocolis croustillants aux inflorescences, aïoli de brocolis et moelle de brocolis, étonne et détonne autant que le succulent faux filet de Wagyu grillé caviar de bœuf, panisses aux pois chiches & pousses d’épinards à l’ail confit, olives, tomates & basilic.


Jérémy CZAPLICKI regarde, dans la mer d’huile bandolaise, l’horizon de douceur de son radieux avenir qui éclaire les calmes calanques les soirs d’été.

25, boulevard Louis Lumière - 83150 Bandol - Tel : 04 94 29 33 05

 
 

LES OLIVIERS HOTEL ILE ROUSSE

L'hôtel de luxe Ile Rousse surplombe la baie de Renécros et sa plage abritée.
Le restaurant Les Oliviers est entre le mains du talentueux chef Jérémy Czaplicki.
Selon la saison la...

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