Lusitanien palais d’or, bourlingueur des origines rares pour les grands chefs, l’enthousiaste de la perfection,
José DA ROSA, depuis un quart de siècle, nous exhorte aux scintillements de la saveur.
Au bord de mer, en 1965, aborde à Aveiro, non loin de Porto, un ogre du possible. La mère ouvrage la terre. Le père, boulanger à Oiã, près de Pateira de Fermentelos, la plus grande lagune naturelle de la péninsule ibérique, fuit l’Estado Novo pour se transmuer en maçon parisien, dans le 10ème. La maman officie en gardienne avisée. Le petiot attend chez son parrain durant trois ans. Là, au matin de son devenir, le chasseur de moineaux au lance-pierre s’éveille à la puissance gustative de la mémoire : «
Je grillais les petits oiseaux au goût acre, je mangeais des pêches de vigne dans l’arbre, j’étais un indien dans la ville mais à la campagne ».
Les poules déambulent au champ, les canards acéphales clopinent. Le raisin se foule au pied tandis que le tue-cochon invente chaque fois une nouvelle fête fraternelle. A 5 ans, le grand goûteur lusitanien escorte son protecteur à la chasse où les bruits des fusils étourdissent, les volatiles dans la gueule des chiens marquent autant que les lapins sauvages. En septembre 1971, le garçon qui ne parle pas un traite mot de la langue de Balzac déboule à Paris dans un Cours Préparatoire de remise à niveau. Il majore son année. Le vrai parigot de Louis Blanc, décide, à 13 ans, d’entrée à l’Ecole Hôtelière.
Il suit les cours du lycée professionnel Belliard dans le 18ème avant d’intégrer FERRANDI : «
Je voulais être cuisinier ». A la maison, il s’exerce aux gâteaux en dilapidant tous les œufs au grand dam de sa génitrice. Elle sait tout cuisiner, midi et soir : des pot-au-feu aux primeurs chamarrés, des viandes marinées aux pommes de terre, des poissons entiers cuits au four. Le petit commis, une fois majeur, rentre « Au Bouchon », un restaurant franco-américain situé dans les Halles. Le bûcheur invétéré multiplie les extras dans un établissement caraïbéen de la rue Saint-Denis.
En 1986, au retour d’une saison corse dans un magnifique hôtel restaurant sis à Alata, sur les hauteurs d’Ajaccio, le fidèle de Porticcio postule à une annonce dans l’Hôtellerie. Le PDG de MARIAGE Frères, Richard A. BOUENO, le reçoit illico presto au 30, rue du Bourg-Tibourg. Tout le chant des possibles s’ouvre alors. L’amateur de thé débutant apprend en faisant. Il monte tout le projet ex nihilo : la carte des cocktails, l'art de la table, la cuisine au thé, le fameux brunch dominical couru de tout Paris.
Le charriot de pâtisseries, les 500 variétés de thés, noirs, fermentés, semi-fermentés, verts, la maîtrise des cérémonies chinoise et japonaise l’amènent à co-écrire le livre sur le thé de la célèbre maison de luxe. «
Je bois du thé toute la journée, la théine se diffuse lentement dans le corps. Un thé se déguste nature, en fonction de la feuille, du moment de la récolte, de la couleur, noir, blanc, rouge ».
Après douze années intenses à la tête de l’institution du Marais qui fait florès jusqu’au pays d’origine du soleil, l’élève du grand maître Kitti Cha SangManee crée son propre lieu, en 1995, dans le quartier. Il se nomme « La Péninsule ». Découvreur de produits extraordinaires en Asie, Italie ou Espagne, le globetrotter du goût sillonne la planète pour introduire, en France, le Jambon ibérique ou le lard de Colonnata. «
Ma démarche diffère, je passe beaucoup de temps à rencontrer les producteurs. Je travaille en direct. J’arrivais avec mes jambons dans des trois étoiles, les pattes dépassaient avec des poils, du gras ».
Réputé pour sa capacité à dénicher des produits hors-normes, en 2002, il ouvre son épicerie fine : DA ROSA 6ème. Importateur exclusif des meilleures huiles d’olive, lards ou encore riz à risotto, il étoffe son catalogue, dépassé par le succès de la rue de Seine : «
Je voulais proposer au public la même qualité qu’aux professionnels ». Le maître de la sélection du must espagnol qui fit découvrir, en février 1995, le Jambon ibérique Serrano à Jean-Louis et Gilbert Costes, découvreur de charcuteries d’exception, du tarama blanc, artiste de l’origine et de la pureté absolues du produit, parcourt des milliers de kilomètres pour se perdre aux fins fonds de la Toscane : « «
Ma femme et mon fils en avait marre de visiter des endroits dans lesquels il n’y a que des jambons qui pendent ». Le chasseur de goûts pour les étoilés sait que «
très peu de chefs connaissent vraiment les produits par manque de temps ». Dans sa nouvelle adresse, au cœur de l’aristocratique 7ème arrondissement, il déniche des vins portugais inconnus, affine la gastronomie sudiste européenne (Italie, Portugal, Espagne, France).
Le fin palais quasi musical revient à la morue traditionnelle, pas trop salée, crue, grillée ou marinée. «
Un goût d’enfance et d’adolescence, des produits que j’adore, que je mangerai tous les jours. Il n’y a pas d’école sauf celle du goût, de la curiosité. Il faut aimer manger pour prendre du plaisir, persévérer, se passionner. Le simple et bon, c’est parfois juste un œuf, remonter à la source ». L’inventeur de tendances aime à convertir ses habitués à de l’exceptionnel y compris sur la modestie d’un haricot blanc.
L’initiateur de saveurs apporta aux parisiens le Bellota, le Culatello Zibello, les charcuteries de Christian Para, la ventrêche de bonite, les sardines José Pena. L’ambassadeur de marques de bouche à oreille présente des conserves à déguster toute l’année, selon les méthodes ancestrales de l’Europe du sud. L’ambassadeur de la région de GIFU depuis sept ans nous confie avec une délectation enjouée à peine dissimulée : «
Un produit est sublime par la façon de le travailler, le cœur qu’y met le producteur, l’attention, la volonté, quand gustativement, tout sonne juste, équilibré, le salage, le fumage, les essences et les épices utilisées. Les produits exceptionnels créent des moments d'exception mais il existe des produits du quotidien qui s’avèrent exceptionnels ».
Chaque moment appelle une émotion. L’entame d’un jambon sublime, d’un saumon sauvage ou d’un riz féérique procure une immense joie. L’accord suit le produit, une algue qu’on rajoute, un assemblage, un essai. Une ventrèche de thon et un piment d’Espelette. José DA ROSA déguste seul d’abord pour rechercher la matière, le goût, la texture. Il fait goûter aux amis japonais pour voir leur étonnement devant des anchois de la Mer Cantabrique, au Nord de l’Espagne, des grosses sardines de Porto, du thon germon.
Il étudie les analogies profondes entre les tempuras, le Castella et le Kasutera, l’aventure du goût dans les civilisations trace un ciel infini.
Da Rosa Grenelle
37, rue de Grenelle - 75007 Paris
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