Emmanuel Giuliani, Directeur de « LA CAVE » :
Par Fabien Nègre
Souvent, la force d’une idée puise ses formes dans l'étrange généalogie d’une trajectoire. Emmanuel Giuliani, 46 ans, parisien de Levallois mais en villégiature corse à Pianello, un petit village au dessus de Corte, juriste de formation, ancré dans le monde réel, croyait en sa bonne étoile. Directeur Artistique dans l'industrie musicale pendant de nombreuses années, grand amateur de billard français qu'il ne pratique plus depuis vingt ans, il n'imaginait absolument pas devenir un orfévre du vin et créer un coffre-fort de belles bouteilles qui occupe aujourd'hui trois salariés.
Comme beaucoup de ses petits camarades des abords du Luco, il fait son droit à Assas afin d'obtenir une bonne formation généraliste. La casuistique conduit à tout à condition d'en sortir. En 1982, il obtient un petit job dans un cabinet de relations publiques, rue de la paix. Très vite, il goûte les joies de l'indépendance et les libéralités de la profession justement libérale. .
Sans la musique, la vie serait une errance.
Dès 1984, il se jette à corps perdu dans le monde interlope de la musique. Il développe son penchant pour la variété française tout en réfléchissant sur le moyen de laisser une trace, engager une source de pérennité associée à la création artistique. Assistant de Jean-Jacques Souplet qui fut le producteur de Gérard Lenormand en tant que Directeur Artistique chez CBS. Simultanément, il découvre les dilections de la table.
Sa mère excelle dans l'art culinaire même s'il met peu la main à la pâte. En 1985, il signe son premier artiste : Ann Lanster. Mais un single ne fait pas le printemps et déjà pointe le souhait de bien gagner sa vie dans l'indépendance. En 1990, il décroche un poste de DA aux Editions Intersong qui deviendront par la suite Warner/Chapell. Il conjoint ainsi ses deux passions : le droit et les artistes. Puis, il passe DA chez TREMA, le gros label de chanson française de l'époque. Il s'identifie aux artistes notamment à l'occasion du 20ème anniversaire de la maison. Il y signe le premier 45 tour français de rap : "Rapsonic". Il collabore indirectement avec les fondateurs, Jacques Revaux et Régis Talar.
In vino veritas.
Mais, en 1995, la déception s'avère cruelle car aucun vrai poste de décideur ne se présente surtout dans un contexte d'entreprise familiale. Grâce à un ancien de Faculté, il intégre un poste de directeur du service juridique dans une PME un peu hors du commun puisqu'elle lui donnera l'idée de sa future société : LA CAVE.
André Chenue SA (150 personnes) détient, en effet, le leadership français et européen de l'emballage, du transport et de la conservation des oeuvres d'art. Contentieux, requêtes, ventes concentrent enfin son esprit jusqu'alors dispersé. En 1997, la PME grossit entre tradition et atelier, cadres et assistantes. Les opportunités musicales s'évanouissent peu à peu. Le dépôt de bilan tourne à l'effet d'aubaine. Emmanuel Giuliani , partie prenante de l'équipe dirigeante, remarque soudain une chose simple. Les métiers de Chenue SA comportent trois activités : l'emballage, le transport et le garde-meubles. .
Un garde-temps pour le vin précieux.
Inspiré par cette idée du garde-meuble pour les oeuvres rares, il créera LA CAVE en juillet 1999. La Cave peut s'enorgueillir de présenter aujourd'hui le plus important garde-meubles pour les vins fins de Paris. Dans ce somptueux coffe-fort du vin, dorment quelques milliers de bouteilles. Aux côtés de Grégoire Darmon puis seul aux commandes, Emmanuel Giuliani possède maintenant 100% de son capital et l'entreprise a trouvé son équilibre financier au bout de trois ans.
Essentiellement masculin, CSP++, parisiens, expatriés professionnels ou grands institutionnels, ses clients, jeunes connaisseurs ou fous du sang de Dieu à l'image du Cornas, apprécient ce service unique et pratique pour son effet de collection, sa capacité d'investissement ou son caractère de transmission patrimoniale.
Emmanuel Giuliani, face à la croissance de la demande, envisage plusieurs stratégies : s'occuper beaucoup mieux des clients émergents, labelliser sa marque, doubler sa capacité de stockage, approfondir le conseil achat/vente, ouvrir un département "recherche de bouteilles rares" (autrement dit, la chasse de bouteilles, très en vogue dans le monde pour une clientèle internationale très haut de gamme), accentuer ses relations-presse : que de réjouissantes perspectives pour un homme qui se donne beaucoup de mal à assurer notre bien. .
Aux commandes d'une entreprise au bel avenir, rompu aux relations publiques mais aussi à celle que l'on noue avec le public, il se lie presque d'amitié avec tous ses clients tant la proximité grandit dès lors qu'il s'agit d'une affaire sévère et sérieuse : les grands crus. A l'évidence, Monsieur Giuliani ne badine pas avec les flacons.
LA CAVE en quelques chiffres :
- 450 clients
- 300KE/an
- 300 000 bouteilles en cave
- 1000 m2
- 2 salariés à temps plein et quelques sous-traitants