Maisdonnais amène, trentenaire du cru à l'énergie enfantée par le vignoble, rigoureux empathique, fervent sympathique, Sébastien DURANCE, frais affûté directeur hanté par sa Loire, aime l'altesse des fleuves et la sincérité des êtres, domine la bulle, cherche les bulles de sa belle prestance, humaine et pudique, à l'aune des bienfaits ligériens de l'extime «Maison d'à Côté».
Amarré, le 3 décembre 1986, à Maisdon-sur-Sèvre, au nid du vignoble nantais, sur ce terroir granitique qui prodigue des muscadets tardifs aux accents de pierre à fusil, l'amoureux du Val de Loire, surgit dans une philosophie du lien commun, bien loin des lieux communs. Le grand-père paternel, Pierre DURANCE, 90 ans au compteur en l'annuité 16, fait son vin. «Nous avons des vignes, une allocation, une petite parcelle de terre, c'est pire que la Romanée Conti, on ne plaisante pas. J'ai du respect pour les vignerons, les viticulteurs, ceux qui travaillent avec leurs mains, un millésime c'est mystérieux, il peut se refermer, s'ouvrir, ne plus jamais revenir, et disparaître».
Toute la maison «adore bien manger» : foie de veau purée, foie gras en terrine, pâtés à l'ancienne. La chance du versant maternel. Entre le beurre blanc et le petit sachet de nougats, le coeur tendre oscille entre pureté et profondeur. Le grand-père maternel ne rechigne pas au pourchas dans les forêts voisines ou l'étang qui borde la demeure. Les faisans à plumer se mêlent aux carottes et aux pommes de terre. «J'ai des souvenirs inoubliables de grands prix de Formule 1 où, mon père et mon grand-père ensommeillés dans le canapé, j'écossais les petits pois». Racines et cultures, oncles et tantes au milieu des pique-niques dominicaux dans les près, saucisses et partie de boules.
A 6 ans, les lèvres débordent la coupe. «J'allais dans la cave discrètement avec mon moyen frère». Le Muscadet-Sèvre-et-Maine réveille le café, les cakes matinaux fument pour l'ainé. A 12 ans, les fêtes familiales donnent envie de «servir pour les gens, avoir une relation privilégiée avec le client». Le créateur, fou de vin, homme de cave, ancien jockey, chef de rayon chez «Métro Nantes», ouvre au monde des rêves liquides. «J'avais les mains dans l'hôtellerie restauration, je me souviens d'un Morey Saint Denis 1993 dégusté avec lui. Une joie du vin, pas des buveurs d'étiquettes, des valeurs, des vieux bordeaux. Mon père m'a ouvert les yeux sur le vin et toujours soutenu».
Cette première clairvoyance du vin le conduit à un «Bac techno, Option hôtellerie». En seconde, l'initiation commence. En 2006, en terminale, Sébastien DURANCE remporte sa «mention complémentaire» en sommellerie, avec brio. Chez ses voisins, au Domaine viticole Henri Poiron, le ceps sculpte son regard. Dans l'étoilé «Royal Barrière» de Deauville, il boit les premiers bordelais : Petrus, Latour et consorts. Le Palace enseigne la posture face à toutes les impostures. Parmi ces «grosses cylindrées» qui créent le frisson, le Puligny-Montrachet « Les Pucelles » 2001 d'Anne-Claude LEFLAIVE, audacieuse et emblématique biodynamiste disparue en 2015, l'éblouissait.
«A 22 ans, j'ai dû résoudre mes problèmes par moi-même». Au Chabichou**, à Courchevel, le vibrant enthousiaste découvre l'ultime émotion, «Pichon-Longueville Baron 1945» entouré par des «grands messieurs droits comme des i» : Bruno CAHUT (Chef sommelier), Stéphane BURON (MOF 2004) et Michel ROCHEDY, un monumental. Une seule devise le vise : «La rigueur dans la bonne humeur, la rigueur ce n'est pas la gueule, la bonne humeur, ce n'est pas la pétaudière». Autant de lignes de conduite et de caps d'espérance qui forgent un esprit pour la vie.
«J'ai appris, j'ai aspiré partout où je suis passé en connaissance pure et en organisation». A l'été 2007, au Pélican, un charmant bib gourmand où se pratique une cuisine traditionnelle française, à Geneston, près de Nantes, l'alerte ambitieux se sensibilise à l'art du service et l'architecture du livre de cave. En 2009, chez le grand chef thaïlandais Oth SOMBATH (75008), second de l'étincelant lunaire Franck-Emmanuel MONDESIR, il apprend les achats, le nez des vins, comprend la nouvelle garde vigneronne.
«Il n'y a pas que le prix dans la vie, il y a la valeur». Dans une décontraction joueuse avec l'habitué, le radieux nantais met en scène des vignobles, fidéliser les nobles. Chef sommelier au Château de Marçay, entre 2011 et 2013, il architecture une carte collection qui affiche plus de 500 références, récompensée par la «grappe Michelin». Emmanuel DE BURON, un grand barman, le forme aux cocktails et à l'art du habano. L'entourage des vignerons de Bourgueil (Mathieu VALLEE, Sébastien DAVID (Saint-Nicolas), Antoine SANZAY à Saumur-Champigny) l'enchante.
Ces années d'émulation tissées par la multiplicité des expériences, des mentalités forment un «pot-pourri d'ouvertures et de remises en question» qui le guide vers la Maison d'à Côté en 2014. Nouveau défi les pieds dans la Loire. «C'est un devoir, un honneur de mettre notre fleuve en avant avec du vin bon et surtout du bon vin». L'enfance de la sommellerie condense une éthique : «Le vin doit faire passer une émotion». Vibrer vers une tension qui nous échappe, sans carte préconçue mais avec une conception singulière de la cartographie.